Goutte froide et flocons mouillés.
Nos vieilles montagnes se sont couvertes de blanc ce lundi soir, on peut même dire que cette chute de neige est la première conséquente de la saison. Certes les flocons avaient été observés à plusieurs reprises durant ce mois de novembre, les plus hautes terres avaient même pâli, mais la couche n’avait jamais dépassé le centimètre.
Lundi soir, les flocons se sont aventurés jusqu’en fond de vallée, vers 20h à Tarare il neigeait à la Plata et pleuvait encore en centre ville tandis que la route de Violay devenait très glissante au dessus de la Croix des Cieux à 640 m d’altitude. Cette chute de neige était assez particulière pour l’observateur averti : la neige tombait abondamment à Violay par une température à peine sous le zéro (-0.2°) et elle tombait aussi quelques 450 m plus bas dans la vallée de Tarare où la température aurait dû être positive de 3 bons degrés. Nous avons assisté à ce que les météorologues appellent un phénomène d’isothermie : la température n’augmente pratiquement pas en fonction de l’altitude (1° pour 400 m ce soir là). Les plus anciens ou les moins jeunes se souviennent certainement d’un certain vendredi 26 novembre 1982 ; le même phénomène d’isothermie c’était produit sur la région stéphanoise et lyonnaise : la neige lourde, collante, aux reflets bleutés avait été la cause de nombreuses ruptures de fils électriques et avait plongé la région dans le noir durant plusieurs jours.
Le mécanisme météorologique amenant cette isothermie est assez complexe ; il faut tout d’abord de l’air très froid en altitude. Cet air froid était bien présent au dessus de nos têtes en ce 29 novembre puisque le radio sondage de 13h effectué à l’aéroport St Exupéry de Lyon indiquait une température de –27° à 5500 m d’altitude. 12 heures plus tard, on mesurait –28° à cette altitude et même –30.5° au dessus de Nîmes. Cette zone glaciale était concentrée sur le sud est de la France (en effet il ne faisait par exemple que –22° à 5500 m au dessus de Stavanger en Norvège), les météorologues parlent alors de goutte froide. Cette présence d’air très froid en altitude provoque une instabilité de l’air, voire même de véritables orages avec tonnerre et éclairs comme ce fût le cas en 1982. Les précipitations sont alors abondantes, tout comme lors d’un orage estival ; les flocons en rang serrés chutent dans l’atmosphère et viennent la refroidir à leur contact et en se liquéfiant. On peut donc dire que le froid descend du ciel, les flocons en sont le principal vecteur. Cette chute de matière froide va donc petit à petit amener la température de l’air au voisinage de 0° sur une grande épaisseur, d’où le phénomène d’isothermie.
Contrairement à novembre 1982 qui avait recouvert la plaine de plusieurs dizaines de centimètres, on s’est contenté cette année d’un blanchissement temporaire le soir vers 500 m, de 5 cm aux Sauvages à 730 m d’altitude, de 7 cm à Violay 100 m plus haut et de 12 cm sur cette même commune à la tour Matagrin (1004 m).
A Violay le 1er décembre 2004.
M. Gagnard