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Grande douceur en montagne.

 

Il y a longtemps que l’on n’a pas vu de janvier si doux en montagne, il faut en effet remonter à 1993 pour en déceler un presque aussi chaud. En plaine et dans les vallées, le constat est différent : janvier 2008 est certes doux, mais moins que celui de l’an dernier ; à Andrézieux, on en compte pas moins de 4 plus tièdes depuis celui de 1996 inclus. Deux nombres suffisent à eux seuls pour résumer le bilan thermométrique de ce premier mois de l’an : 3.8° c’est la moyenne mensuelle des températures du nouveau poste de l’Association Météo d’entre Rhône et Loire implanté à Salvizinet (lieu dit la Valette, vallée de la Charpassonne à 400 m d’altitude), 5.1° est la même moyenne mesurée 200 m plus haut en altitude à Montchal. Même à Violay, à un peu plus de 800 m d’altitude, la moyenne de ce janvier est plus douce de 0.7° que sur les bords de la Charpassonne. On remarque le même « paradoxe » sur les monts du Forez où Leigneux se révèle plus froid de 0.7° que St-Just-en-Bas ou encore du côté du Lyonnais : le Breuil moins tiède qu’Aveize ou que Montmelas.

            Ce curieux phénomène -que l’on a rencontré à l’identique en décembre dernier- trouve son explication dans la pression atmosphérique. Ce mois-ci, comme lors de tous les mois depuis septembre compris, la pression moyenne réduite au niveau de la mer est plus élevée que la normale ; l’excédent s’élève à 4 hPa pour ces 5 derniers mois, ce qui est remarquable. Si la pression est plus élevée sur une région que sur une autre, c’est que l’épaisseur de l’atmosphère y est plus importante qu’ailleurs ; or une « bosse » d’atmosphère n’est pas une situation stable (comme un bourlet d’eau n’est pas une configuration stable à la surface d’une piscine par exemple). Pour essayer d’aplanir la situation, l’air va donc avoir tendance à  descendre  des altitudes élevées vers le sol, on dit alors qu’il est subsidient (par opposition à ascendant). Cet air descendant, à cause de la rugosité du sol (vallées, montagnes, forêts…) ne progresse pas vraiment jusqu’à la Terre, il stoppe sa chute un peu avant et s’écoule alors horizontalement. De l’air venu des très hautes altitudes est évidemment froid mais cet air sec, en descendant -donc en se comprimant-  subit un réchauffement de 1° par 100 m ; il est donc devenu particulièrement doux lorsqu’il s’étale horizontalement aux alentours de 500 ou 1000 m d’altitude. Dans ce schéma, la montagne jouit donc d’un air tiède et très sec, la visibilité y est excellente tandis que les plaines et vallées demeurent totalement étrangères au mécanisme, elles conservent leur air indigène brouillé et fortement refroidi par le gel nocturne du sol. C’est d’ailleurs ce radical découplage entre basses et hautes couches atmosphériques qui explique les forts taux de pollution au voisinage des agglomérations : la plaine garde son air, la montagne garde le sien.

Orage hivernal.

Les deux premiers jours de l’année demeurent assez froids : le premier est sans dégel au dessus de 600 m d’altitude environ, en effet les maximales ne dépassent pas 0° à St-André-la-Côte, -0.1° à Aveize (Chenevière), -0.3° aux Sauvages, -1.3° à Violay. Arrive ensuite une décade fréquemment pluvieuse et aux températures fort agréables pour un début janvier. Du 3 au 11, la moyenne des maximales atteint celle que l’on rencontre normalement lors de la seconde décade de mars ; la moyenne de ces 9 jours atteint 12° à Andrézieux, 11.9° à Feurs et Bron, 11.6° à la Valette (Salvizinet, pas Malte), 11.4° au Breuil, 11.1° à Villefranche, 10.5° à Aveize (Chenevière), 10.4° à Pomeys, 9.9° à Montchal, 8.4° à St-André, 6.3° à Violay Matagrin et 6.1° au mont St-Rigaud. Dans la nuit du 5 au 6, le vent est violent : la station automatique de Météo France implantée juste sous le sommet du puy de Dôme à 1415 m d’altitude enregistre une rafale à 169 km/h.

Cette période hors saison se termine le 11 en apothéose avec des maximales printanières en plaine : 15.7° au Breuil, 15.2° à Bron et Montbrison, 15° à Villefranche et Feurs Randan pour ne citer que les plus élevées. Ce même jour, de l’air plus froid arrive en altitude par l’ouest, d’ailleurs les postes de montagne subissent une journée nettement moins chaude qu’en plaine : seulement 3.6° de maxi à la Jasserie dans le Pilat. Ce contraste entre de l’air chaud en plaine et froid en montagne déstabilise l’atmosphère comme en été : le soir à partir de 21h 50 et jusqu’à 22h 30 environ, le tonnerre gronde et les éclairs illuminent la nuit. La pluie se change assez rapidement en neige au dessus de 700 m environ.

    Les cumuls de pluie ou neige de ce premier épisode orageux de l’année sont, comme bien souvent, assez disparates d’une commune à une autre. Cette fois ci, les abats s’avèrent nettement plus faibles en Plaine du Forez et dans le Bassin Roannais (1.5 mm à Leigneux, 3.5 à St-Rambert et Craintilleux, 5.5 à Villerest, 6.8 à Feurs Randan, 8 à Andrézieux) qu’en Lyonnais ou Val de Saône : 13.7 mm à Montmelas, 14.9 à Anse, 15 à Montrottier, 18 à Pierre-Bénite, 19.4 à Bron, 20.9 à Corbas et 21 à st-Exupéry. Cet orage n’annonce pas l’arrivée du mauvais temps, bien au contraire puisque le soleil revient en force dès dimanche 13 où la visibilité en montagne est extraordinaire.

Canicule aux sommets.

C’est dimanche 20 (de nouveau un dimanche !) que la montagne vit une journée exceptionnelle de douceur, on devrait même dire de chaleur puisqu’en certains lieux la maximale enregistrée cet après-midi de janvier n’a pas été atteinte une fois sur deux en juillet et août derniers. Ce jour là, sous un soleil éclatant et une vue excellente, les stations automatiques de Météo France mesurent des maximales de 15.3° au col de la Loge (1270 m alt), 16.1° à Aubrac (Aveyron 1400 m), 17.6° à Fix St-Genest (Haute-Loire 1120 m), 17.8° au crêt de l’Oeillon (1370 m), 18° aux Estables (1486 m) et même 18.5° sur le mont Lozère, au Bleymard à 1420 m d’altitude. Dans les Alpes, la chaleur est tout aussi présente avec 14.5° à Chamrousse (1730 m), 17.4° au relais du Chat (1500 m) ; dans les Pyrénées, l’observatoire du Pic du Midi de Bigorre situé à 2880 m d’altitude mesure une maximale à 9.4° dans un air à 2% d’humidité relative. Ces valeurs sont tout à fait exceptionnelles et elles montrent une fois de plus que les records de chaleur hivernaux appartiennent, contre toute attente, à la montagne et non à la plaine ; la preuve ? En 87 années de mesures, la température la plus élevée mesurée en janvier à Bron n’est que de 17.9°. En hiver, c’est bien un anticyclone (avec son air descendant) qui peut apporter de la chaleur en montagne, le soleil est en effet trop bas pour pouvoir échauffer considérablement le sol des régions de plaine. Durant cette journée mémorable, les températures des basses altitudes sont elles aussi d’un bon niveau, mais nettement en deçà de celles précédemment citées : 12.4° à Corbas, 13.2° à Feurs, 13.7° à Ecully, 14° à Andrézieux ; sur notre moyenne montagne, l’air est même presque frisquet avec des maxis de seulement 6.6° au St-Rigaud et 7.6° à Violay Matagrin. On peut peut-être expliquer ce curieux étagement de température par une éventuelle convection (de l’air qui monte donc qui se refroidit de 1° par 100m) entre la plaine et l’altitude de 1000 m environ.

    Le temps globalement anticyclonique s’étire jusqu’en fin de mois avec de temps à autres quelques coups de chaud sur les hauteurs ; ainsi le 27 (encore un dimanche !) le soleil brille aux Sauvages sous une maximale de 13.3° alors qu’à Corbas le ciel est gris avec une température qui ne dépasse pas -0.4° ; ce matin là, l’enregistreur de la Valette atteint son plus bas niveau du mois avec -8.6° tandis que, 600 m plus haut, celui de la tour Matagrin ne parvient même pas à geler (mini de +0.7°).

La pression atmosphérique réduite au niveau de la mer atteint un sommet samedi 26 : à 11h on la mesure à 1042.9 hPa à Andrézieux, et sa moyenne sur la journée se hisse à 1040.8 hPa. Il faut remonter au 4 février 2000 pour trouver une journée à aussi forte pression moyenne. Depuis 1949, on ne compte à Bron que 36 journées à pression moyenne supérieure à 1040 hPa, et parmi celles-ci, 15 se situent en janvier.

Globalement, les cumuls mensuels de pluie ne s’éloignent guère de la normale. On note un léger excédent là où les orages du 11 au soir ont été les plus productifs, c’est-à-dire en Lyonnais ainsi qu’en Val de Saône. Ailleurs, la sécheresse est sensible, particulièrement dans le sud de la Plaine du Forez où les cumuls sont inférieurs à 25 mm. Les totaux millimétriques suivants sont éventuellement suivis par le rapport à la normale : Andrézieux 29,2 / 76 %, Balbigny 32,5 / 80 %, Montrottier 52,1 , Villerest 39,2 , Riorges 33,6 / 81 %, Bully 37,6 / 84 %, Montchal 49,4 , Violay 54,0 / 87 %, St-Etienne 38,1 , St-André 53,6 , Corbas 59,8 / 113 %, Villefranche 51,3 / 112 %, Montmelas 61,2 / 100 %, Anse 51,5 , Ecully 45,3 , Bron 54,8 / 104 %, Feurs 19,5 , Feurs Randan 24,9 / 71 %, le Breuil 39,2 / 82 %, Les Sauvages 53,0 , St-Rambert 23,7 , Craintilleux 22,7 , Leigneux 25,4 , Pierre-Bénite 55,3 , Satolas 59,2 , Pommiers-en-B. 51,6 / 116 %.

A Violay le 5 février 2008.

M. Gagnard

m.gagnard@univ-lyon1.fr

http://perso.orange.fr/meteolyonnaise/indexclim.htm